Georges MOUSTAKI
Un chat d'Alexandrie

Moustaki s'entretient avec Marc Legras et évoque ses rencontres avec Georges Brassens.
Voici un morceau choisi:
"J'ai écouté Brassens pour la première fois aux Trois-Baudets où Henri Salvador était en vedette. Il chantait en lever de rideau, totalement inconnu, moustachu, soufflant, suant ; un physique et un vocabulaire sans rapport avec celui des chanteurs de l'époque. Je n'avais jamais entendu rien de semblable. Je sentais qu'il se passait un événement.
Quelques jours plus tard, un journaliste, Henri Marque, qui le connaissait, a proposé de me le présenter. Il l'a emmené à la librairie de Jean-Pierre Rosnay, qui nous tenait lieu d'atelier de création et de club de rencontre, nous étions plusieurs aficionados. Il eut un mot pour chacun. « Et toi, qu'est-ce que tu fais ? » m'a-t-il demandé.
Riche de trois chansons que j'avais composées, je les lui fis écouter. Il me complimenta d'un « C'est de qualité » et s'en fut sur ce commentaire un peu vague qui ne le compromettait pas.
Devenu célèbre en quelques semaines, il profita de sa gloire soudaine pour donner un coup de main à quelques confrères. Dont moi.
Jacques Canetti, directeur artistique déjà tout-puissant chez Philips et patron des Trois-Baudets, salle mythique aux pieds de la Butte, Francis Claude qui animait Milord l'Arsouille au Palais-Royal et quelques autres m'ont convoqué. Tout le monde voulait entendre le protégé de Brassens. J'avais un peu honte de ce remue-ménage pour mes trois malheureuses chansons.
Pour répondre à l'attente, essayer d'être digne de Brassens, j'entrepris d'accroître mon répertoire. Je garde le sentiment de devoir lui rendre des comptes lorsque j'écris une chanson."

Editions de Fallois (2002).
Merci à Marie-Christine Lefebvre pour la rédaction de cette fiche

Retour